LE SURVIVALISME, KÉSACO ?

Posté par 2ccr le 30 septembre 2015

 ebolaAu départ, il s’agit surtout d’un phénomène états-unien, issu de la guerre froide et alimenté par une série d’écrits marqués à l’extrême droite, voire néonazi. L’un des premiers ouvrages à connaître une certaine audience est  « Famine et survie en Amérique » (1974) de Howard Ruff centré sur la nécessité de se procurer de l’or en cas de crise (ce qui au passage devait sûrement faire les affaires de Ruff, vu qu’il spéculait dessus). Sorti un peu plus tard, on peut aussi citer  » La Stratégie Alpha » (1980) de J. Pugsley, mais on pourrait énumérer toute une littérature théorique diffusée sous formes de brochures et de fanzines qui s’articulent autour des mêmes thèmes : dénoncer la corruption morale de la société, affirmer l’imminence de l’effondrement et appeler à s’y préparer concrètement.

De plus, l’un des traits caractéristique du survivalisme et qui participe du succès de sa diffusion, c’est le support fiction. Quasiment dès l’origine de ce courant on trouve des romans d’anticipation qui explorent les thèmes survivalistes, diffusent les bases de l’idéologie sous une forme plus ludique et accessible.

Ce succès littéraire gagne rapidement l‘industrie culturelle américaine qui récupère ce thème dès les années 1970. Films et séries exploitent le survivalisme avec plus ou moins de bonheur. Comme en témoigne l’essor des films de zombie (700 depuis 1985), les films de pandémie et plus généralement la prégnance du thème de l’effondrement dans la production de films de ces 30 dernières années. Les séries participent aussi ces dernières années de la mode, avec the Walking Dead, Revolution, Falling Skies, Sibéria, Dead set, Survivor. Sans parler des jeux vidéo catastrophistes dont la série des Fallout est la figure de proue.

Ces fictions ne sont évidemment pas sérieuses, et une partie développe même des positions opposées au survivalisme. Elles participent cependant à façonner un imaginaire catastrophiste, reprenant aussi les mythes fondateurs des États-Unis, formant « un air du temps »… A tel point que la chaîne de télévision National Geographic diffuse un programme de téléréalité dédié au phénomène, intitulé « Doomsday preppers ».

Sur un mode plus sérieux, on trouve sur internet, forums, sites, toute une survivalosphère souvent en lien avec les délires complotistes qui s’est développée aux EU mais aussi en Europe. On voit même le développement d’un secteur marchand de « prepping » qui permet de faire des stocks (alimentations, électricité, armes) pour se préparer à l’effondrement.

 Qui sont les survivalistes ?

Les preppers sont un vrai phénomène social : plus de  3 millions de personnes stockent des rations de survie et armes en vue de l’effondrement.  (Oui, ils se font appeler preppers, parce que « survivaliste » ça fait trop « psychopathe qui vit dans les bois »…)

En France, le phénomène est loin du niveau d’outre atlantique, bien que les ventes de nourriture lyophilisée augmentent. Bien sûr, c’est surtout l’extrême droite qui s’y intéresse. En France, par exemple, Alain Soral à créé sa ligne de matériel survivaliste et vend des manuels de survie.

 De quoi le survivalisme est- il l’expression ?

 Nous l’avons vu, le discours survivaliste connaît une large diffusion. S’il en est ainsi, ce n’est pas du fait des scénaristes de Hollywood, malgré tout leur talent. C’est qu’il est un produit typique du capitalisme contemporain. Il s’appuie sur l’atomisation individuelle, la nostalgie des rapports sociaux traditionnels bouleversés par le capital. Et si le survivalisme en tant que tel est clairement d’extrême droite, certains traits qui le composent peuvent se retrouver bien au delà (la nécessité de se préparer à la catastrophe, de constituer des groupes restreints, de fuir la ville pour constituer des bases autonomes…)

 Le point commun à ces différentes positions : l’absence de perspective de classe.

Cela s’explique en partie par les bouleversements sociaux majeurs qu’a connus la société capitaliste depuis les années 70, appelés par certains marxistes la « restructuration ». Cette restructuration a non seulement précarisé les prolétaires, fait exploser le chômage et baisser les salaires, mais aussi provoqué l’effondrement du mouvement ouvrier traditionnel, c’est à dire des partis et syndicats de masse encadrant les prolétaires.

 Ainsi, l’une des conséquences de cette contre-révolution capitaliste, c’est d’avoir renforcé l’atomisation de la société, et sapé les solidarités de classe que portait le mouvement ouvrier traditionnel. Cela a encore donné plus de crédit aux idées dominantes (c’est à dire celle de la bourgeoisie) selon lesquelles il existerait une nature humaine qui nous forcerait à nous comporter les uns envers les autres comme des bâtards. Le problème, c’est que même en suivant l’hypothèse de base des survivalistes (la catastrophe) ça ne se passe pas forcément comme ça.

 La bêtise du fantasme survivaliste confrontée à la réalité des phénomènes catastrophiques.

 Les tremblements de terre qui ont ravagé Haiti ou le Chili, l’ouragan Katrina à la Nouvelle Orléans : les exemples de catastrophes naturelles ne manquent pas ces dernières années. Loin d’être le théâtre d’une guerre opposant les survivants les uns aux autres tels des bêtes sauvages, ces situations ont vu nombre de survivants déployer des trésors de solidarité collective et d’entraide.

Concluons simplement sur un exemple : après l’ouragan, à la Nouvelle Orléans, les habitants se sont organisés ensemble. Ils ont mis en commun leurs moyens, protégés les malades et les personnes âgées. Les ouvriers des raffineries sont rentrés dans les entrepôts des bateaux, pour les prendre et sauver leurs voisins agrippés aux toits dans les eaux de l’inondation ; les mécaniciens ont aidé à démarrer toutes les voitures trouvables pour qu’elles acheminent des gens en dehors de la ville ; les ouvriers de restauration ont récupéré tout ce qu’ils pouvaient pour improviser des repas communaux pour des centaines des personnes abandonnées.

Et ils ont du faire tout cela sans aide et même de facto contre les policiers, puis les mercenaires de black water déployés sur place, qui ont protégé les propriétés privées au détriment des besoins de la population.

C’est que la ligne de conflit, n’en déplaise au survivalistes, n’était pas « tous contre tous ». Elle était entre l’organisation collective, de classe, de la solidarité et la gestion capitaliste de la pénurie. Une gestion capitaliste qui aggrave encore le désastre, et ne voit dans la catastrophe qu’une nouvelle occasion de se faire du fric (en virant les prolétaires noirs de la Nouvelle Orléans, par exemple).

Il en est de même dans la crise. Le survivalisme n’est au fond que le post capitalisme des imbéciles !

 Par Rataxes et Oulianov

« La perfection des moyens et la confusion des buts semblent caractériser notre époque »… Albert Einstein

Et si nous lancions le débat ?

Une Réponse à “LE SURVIVALISME, KÉSACO ?”

  1. blaise dit :

    « après l’ouragan, à la Nouvelle Orléans, les habitants se sont organisés ensemble. Ils ont mis en commun leurs moyens, protégé les malades et les personnes âgées ».

    allez raconter cela à la Nouvelle-Orléans, à tous les Noirs, vieux, handicapés, pauvres, etc, qui vivent toujours et encore dans des ruines…

    Ah certes, le Vieux Carré français est reconstruit comme à l’identique et les touristes reviennent voir les Noirs faire de la musique dans la rue… Comme c’est sympa !!!

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