Parler de plein emploi c’est juste un slogan électoral

Aujourd’hui, le chômage est vécu comme un chantage permanent pour les salariés, qui doivent accepter toutes sortes de régressions. Malgré un emploi, il devient difficile de se loger, de nourrir ses enfants ou de se soigner. « Compétitivité et rentabilité sont indispensables et les chômeurs sont des fainéants ! », il est facile avec un tel postulat de faire admettre qu’il est immoral d’accepter une situation dans laquelle les sans-emplois recevraient une aide. Mais ces aides assurent une relative paix sociale et leur suppression pourrait être la goutte d’eau qui ferait déborder le vase. Alors, on grignote, on grignote, on culpabilise, mais l’on ne supprime pas. On encourage les associations caritatives à s’engager dans le combat contre la pauvreté, ce qui permet à l’Etat de s’en désengager, transformant une solidarité nationale en charité privée. L’Etat ne peut pas « aider » et les pauvres et les riches … et nos gouvernants ont fait leurs choix ! Ils font des cadeaux de riches aux riches, et des cadeaux de pauvres aux pauvres, mais les cadeaux faits aux pauvres ont toujours une date de péremption !

Tant que les politiciens continueront à faire semblant de croire à un possible retour au plein emploi, il n’y aura aucune solution à cet état de fait. Pour raisons de technologie et de démographie, du boulot, y’en aura de moins en moins, et c’est tant mieux, si des robots sont capables de travailler à notre place, pourquoi s’esquinter la santé ? Par contre, si l’on est capable de produire plus de richesses avec moins de personne, il faut revoir entièrement la redistribution de cette richesse. Car vouloir soi-disant réduire le chômage, sans rien changer à notre système économique, est à mon avis, du même acabit que de vouloir manger un bol de soupe avec une fourchette !

Petite anecdote qui démontre cela : En 2019, 3 minutes suffisent ⁽¹⁾ pour produire le même nombre de voitures qu’en une journée complète il y a 50 ans, tout cela fabriqué par plus de 2000 robots. Aujourd’hui, Il faut compter environ 1 heure de fabrication pour produire un lave-linge fini ⁽²⁾, emballage compris. La fabrication d’un portable demande 27 secondes ⁽³⁾ : « Alors qu’en 2015, chaque ligne de production nécessitait 97 employés, la production du Huawei Mate 40 ne nécessite que 14 employés », a récemment confié Zheng Yelai, vice-président de Huawei. Alors le plein emploi, c’est une fake new !

Plutôt que de chercher à culpabiliser les chômeurs, il serait plus judicieux de redistribuer intelligemment la richesse produite, l’histoire va dans ce sens, le progrès finira par libérer totalement l’homme de l’aliénation du travail ! En attendant, les milliards que l’on distribue allégrement au Medef sans contrepartie ⁽⁴⁾, devraient être attribués selon des critères sociaux : niveau des salaires, conditions de travail, perspectives d’embauche, et donc s’il le faut diminution des horaires, donc partager les bénéfices, mais aussi le travail !

Une autre petite anecdote, en 1981, les dividendes versés aux actionnaires représentaient 10 jours de travail par salarié. En 2012, ils représentaient 45 jours ⁽⁵⁾ soit 4,5 fois plus, soit l’équivalent de 9 semaines de congé. A combien en sommes-nous aujourd’hui … qui a la réponse ? Vous voyez bien que toutes les fables que l’on nous sert sur « Il faut travailler plus », ou « Le travail coûte cher », disparaissent d’un coup de baguette magique devant le seul énoncé de ces chiffres ! Dans dix ou quinze ans, au rythme où vont les choses, les dividendes versés aux actionnaires représenteront combien de mois de travail par salariés ? Cinq, six, sept, plus ?

Prétendre combattre le chômage en respectant les règles fixées par le système capitalisme, dont le seul but est la maximalisation des profits, est de la fiction. La réduction des effectifs et les réductions de salaires sont des variables d’ajustement prévues et largement utilisées par « le code du capital ». Tant qu’il n’y aura pas de barrière à l’enrichissement sans limite d’une minorité au détriment de la majorité, on ne peut ni combattre le chômage, ni la précarité. Tout le reste n’est que foutaise et mensonge.

Ref:

(1) La Tribune Auto.com, le 28/04/2019 : « L’industrie automobile a connu une évolution fulgurante en 50 ans ». (2) Les Numériques.com, le 07/06/2015 : « Reportage – Comment fabrique-t-on un lave-linge ? ». (3) Labo FNAC.com, le 02/12/2020 : « Huawei n’a besoin que de 27 secondes pour fabriquer un smartphone ». (4) Club Médiapart, le12/10/2010 « Premier assisté de France…le MEDEF », (5) Regard.fr, le 04/12/2013 : « Le temps des rentiers », le 4 décembre 2013.