Parlons sans fioriture du coût du capital
Posté par 2ccr le 20 novembre 2024
En Europe comme ailleurs, les différents gouvernements imposent depuis des décennies des régressions sociales toujours plus radicales en transférant sur les citoyens les coûts du capital. Une part des responsabilités incombe aussi à une partie des directions syndicales réformistes qui ont intégré la fable de « la main invisible du marché » et de la concurrence « libre et non faussée », qui détruit les protections sociales et les services publics. Quelle société voulons-nous ? une société apaisée qui regarde l’avenir avec confiance ou une société où la méfiance et la peur sont la norme ? Une société basée sur la solidarité et le partage des richesses ou une société basée sur l’exploitation et l’injustice ? Une société où le coût financier est plus important que le coût humain ou une société qui place l’humain avant l’argent ? Une société où les profits du capital sont supérieurs aux biens communs ou une société dans laquelle les intérêts collectifs doivent passer avant l’intérêt privé ? Une société où les plus riches ont tous les droits ou une société d’où la pauvreté a été éradiquée ? Dans la société actuelle, les capitalistes nous coûtent de plus en plus cher, les entreprises du CAC40 sont sous perfusion de l’état (3) et les dividendes versés aux actionnaires ne cessent d’augmenter (4), tandis que l’on précarise toujours plus la main d’œuvre (5), le coût humain du capital est exorbitant et pénalisant pour l’ensemble de la population. Cette réalité est continuellement passée sous silence par les responsables politiques, qui nous culpabilisent en mettant en cause notre responsabilité personnelle, ou nos mauvais choix individuels, mais ce n’est pas nous qui décidons des politiques économiques, des choix techniques des entreprises, des délocalisations, des investissements ou des politiques commerciales. Ils passent sous silence que lorsque nous jugeons que ce sont eux qui prennent les mauvaises décisions impactant nos vies et notre avenir, et que nous osons contester, ils nous envoient leurs CRS. Certains ont même dépassé les limites et offert 75 000€ à des tueurs à gages (6) pour neutraliser un syndicaliste jugé « gênant » !
Cela fait des décennies que le patronat bénéficie d’exonération de cotisations, d’exonération fiscale (7), et que pourtant le chômage continue d’augmenter. Cela fait des décennies que les capitalistes pratiquent la fraude fiscale (8), l’évasion fiscale dans les paradis fiscaux, tout en continuant massivement à licencier, à augmenter les emplois précaires pour préserver les dividendes des actionnaires. Cela fait des années que les conséquences sociales des décisions des multinationales donneuses d’ordre s’abattent sur les salariés des petites entreprises et font grossir les rangs des chômeurs. Cela fait des années que les conditions de travail se dégradent et provoquent de plus en plus de burn-out, de dépressions, de suicides au travail.
Toujours accros aux aides publiques (9), les entreprises du CAC 40 ont versé plus de 60 milliards d’euros à leurs actionnaires en 2019, et en 2023 les dividendes ont battu des records pour les multinationales françaises (10) ! Les gouvernements successifs n’ont eu de cesse d’exonérer les riches. Après Sarkozy, Hollande, celui de Macron a mis les bouchées doubles. La promesse d’une réforme fiscale juste et redistributrice est un miroir aux alouettes, aucune remise à plat des niches fiscales (11) injustes et inutiles qui représentent 100 milliards d’euros, pas de progressivité radicale de l’impôt sur le revenu. Rien n’a changé, il y a toujours un déséquilibre entre une fiscalité de plus en plus allégée pour les grandes entreprises et l’augmentation du poids de cette fiscalité pour les ménages, les artisans, les petites entreprises et les commerçants. L’impôt est un véritable « contrat social » qui permet une prise en charge collective des besoins collectifs, et joue ainsi un rôle primordial dans la répartition des richesses. C’est ce contrat social que le néolibéralisme veut détruire, pour achever le contrôle sur les marchés de la Santé, de l’Éducation ou de l’Environnement et accroitre le profit des plus riches.
Le coût du capital pour la société est destructeur, puisqu’il sape les principes fondamentaux de solidarité, d’égalité, de partage des biens communs et de défense des services publics. L’extension de la marchandisation et des privatisations (12) sont les dogmes du capitalisme et du social libéralisme. Ce ne sont ni le coût du travail, ni le soi-disant poids des cotisations patronales, et encore moins les 35 heures, qui sont le problème, mais bien le coût du capital. Toute politique économique qui se refuse à prendre ce problème à la racine est vouée à nous mener au désastre et à plonger dans la pauvreté des couches de plus en plus importantes de la population. Si vous reprenez les discours de nos dirigeants depuis des décennies, et plus récemment ceux de Sarkozy, Hollande ou Macron, vous vous apercevrez que le fil conducteur de leur politique est la diminution des charges des entreprises, la baisse des impôts des entreprises, et les aides aux entreprises, tout cela pour relancer l’emploi : le résultat est un fiasco, ça ne marche pas !
Que fait quelqu’un d’intelligent quand il constate que ce qu’il fait ne fonctionne pas ? Eh bien, il analyse pourquoi cela ne marche pas et cherche une nouvelle solution. Et bien nos dirigeants font l’inverse, ils s’obstinent, ils renforcent des mesures qui ne produisent que l’effet inverse au but recherché. Alors, ou ils ne sont pas intelligents, ça peut s’entendre, ou alors ils ne recherchent pas l’intérêt général, mais servent des intérêts particuliers…
On pourrait aussi, plutôt que de jeter l’argent dans les poches du patronat, utiliser ces sommes colossales pour relancer l’emploi et l’économie via des grands travaux financés par l’Etat. Ce ne sont pas les chantiers qui manquent : écoles, universités, hôpitaux, logement sociaux … tout cela donnerait du travail à de nombreuses entreprises du BTP et autres. Evidemment, l’Etat pourrait très bien incorporer un volet social dans les appels d’offre, et vérifier les coûts véritables surfacturés, souvent en décalage flagrant avec les coûts initiaux prévus. Rappelons qu’embaucher un million de fonctionnaires de base, catégorie C (fonction publique d’Etat), nous coûterait environ 35 milliards … à mettre en perspective avec les milliards distribués sans contrepartie aux grosses entreprises, sans que cela ne crée le moindre emploi.
Ref:
Toutes les références sont dans Miscellanées Politiques N°2 : « Cogitation d’un quidam ordinaire »
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